TIMS, le nouveau programme au service de l’éco-mobilité inclusive

Le programme TIMS piloté par le CLER-Réseau pour la transition énergétique et porté par AURA-EE, Mob’in et le RARE est lauréat du dernier appel à programmes CEE (Certificats d’économie d’énergie) du ministère de la Transition énergétique. Bouchra Zeroual, directrice des programmes et du développement du CLER - Réseau pour la transition énergétique, nous en dit plus.

En quelques mots, qu’est-ce que le programme TIMS ?

Bouchra Zeroual : TIMS, acronyme pour Territoires Inclusion Mobilité Sobriété, est un programme pour contribuer à structurer un secteur en émergence, celui de l’éco-mobilité inclusive. Concrètement, il s’agit d’offrir des solutions d’éco-mobilité à des ménages empêchés et des territoires enclavés. Cela concerne ceux qui n’ont pas de solutions de mobilité, comme par exemple des ménages précaires sans voiture et dépendants de transports en commun trop chers ou non disponibles sur leur territoire. La mobilité durable existe déjà (autopartage, transports en commun). La mobilité inclusive aussi (vélo-écoles, aide au passage du permis de conduire). Mais la rencontre de ces deux types de mobilité doit être entièrement structurée. C’est notre objectif  avec ce programme d’éco-mobilité inclusive reposant sur 90 actions locales menées dans une dizaine de régions pilotes.

C’est la première fois que le CLER-Réseau pour la transition énergétique pilote un programme sur la mobilité. Est-ce une thématique incontournable pour la transition énergétique ?

visuels-site17-2

B.Z. : Le prix des carburants a été multiplié par deux en dix ans. En moyenne, hors Île-de-France, un ménage consacre 90 % de son budget mobilité à la voiture, c’est beaucoup trop ! Et les trois quarts des habitants des communes rurales n’ont que leur véhicule personnel pour se déplacer. À l’avenir, de moins en moins de ménages vont pouvoir se payer un véhicule, et nous devons dans le même temps réduire nos émissions de gaz à effet de serre.

Le mobilité soulève de véritables enjeux d’inclusion : un tiers des jeunes non diplômés sont contraints de refuser des offres d’emplois car ils n’ont pas les moyens de s’y rendre. Un tiers des séniors ne se déplacent qu’une fois par jour et sont isolés. Dix pour cent des ménages les plus modestes consacrent au moins 20 % de leurs revenus disponibles au transport. Une dépense qui vient s’ajouter à celles destinées au chauffage et au logement. La précarité énergétique concerne aussi les enjeux de mobilité.

En mettant bout à bout tous les problèmes d’accès aux soins médicaux, à l’emploi, nous faisons le constat d’enjeux sociaux, économiques et territoriaux. Les territoires ruraux par exemple sont bien moins dotés en transports en commun et en infrastructures que les grands centres urbains. Nous avons besoin d’un changement de culture global et profond ! 

Dans le contexte d’urgence sociale et climatique, la voiture individuelle n’est plus possible. Il est absolument nécessaire de construire des alternatives.

Quelle est l’ambition de TIMS ? À qui s’adresse-t-il ?

B.Z : Notre ambition est de participer à la structuration de ce secteur en contribuant à la professionnalisation des acteurs locaux : formation de conseillers et de référents en éco-mobilité inclusive, et mise à disposition d’un centre de ressources. Nous souhaitons aussi permettre aux territoires enclavés de construire et de proposer des solutions adaptées aux ménages les plus précaires. On définit  comme territoires enclavés ceux qui n’ont pas les moyens d’offrir des solutions de mobilité aux ménages, que ce soient des communes, des villes ou des départements. L’échelon régional sera a fortiori central dans l’émergence de l’éco-mobilité inclusive.

Un autre axe est de proposer des solutions aux territoires proches des métropoles dans le cadre des zones à faibles émissions de mobilité (ZFE-m). D’ici 2025, les 43 agglomérations de plus de 150 000 habitants devront avoir instauré une ZFE-m. Dans ces zones, la circulation des véhicules les plus polluants pourra être limitée, or ce sont les ménages les plus précaires qui possèdent les voitures les plus anciennes et qui risquent ainsi de rencontrer le plus de difficultés pour accéder aux métropoles. Nous devons donc construire des solutions alternatives.

Sur quelle méthodologie repose le programme ?

Les solutions seront construites par les territoires car ce sont eux qui connaissent le mieux leurs contextes. Ils sont donc les mieux placés pour construire une solution adaptée, à partir d’un catalogue de fiches actions à déployer : information sensibilisation, autopartage, covoiturage solidaire, transport à la demande… La première année du programme sera consacrée à la construction de ce catalogue et à la professionnalisation du futur secteur. Dans ce but, nous créerons les formations destinées aux futurs référents en éco-mobilité inclusive sur les territoires et aux futurs conseillers auprès des ménages. Pour animer ce réseau professionnel, des ressources seront produites, capitalisées, recensées et diffusées.

Dans un deuxième temps, à l’été 2023, un appel à manifestation d’intérêt sera lancé pour mettre en musique 90 actions locales dans 8 régions dès 2024 jusqu’en 2026. Nous lancerons également une dizaine de territoires expérimentaux TEMI territoires à mobilité inclusive, pour aller encore plus loin en créant des écosystèmes d’acteurs décloisonnés.

Pourquoi travailler en consortium ?

B.Z : Nous sommes quatre réseaux à avoir répondu ensemble à un appel à programmes gouvernemental de certificats d’économies d’énergies. En effet, aucune de nos quatre structures ne pouvait proposer à elle seule un programme complet sur l’éco-mobilité inclusive, tout simplement car ce secteur n’existe pas encore au sens où nous entendons le structurer.  Nous nous sommes donc rapprochés les uns des autres.

L’ancrage territorial et l’attention aux ménages les plus précaires sont des préoccupations que nous partageons. Le réseau Mob’in, constitué d’environ 300 structures associatives,  est spécialiste de la mobilité inclusive au plus près des ménages précaires. Le réseau régional AURA-EE a déjà expérimenté l’éco-mobilité inclusive en Auvergne Rhône-Alpes.. Le RARE réseau des agences régionales de l’énergie et de l’environnement, apportera ses compétences pour disséminer le programme en particulier à l’échelon régional et son expertise liée aux observatoires énergie et climat et à l’accompagnement au changement.

Quant au CLER-Réseau pour la transition énergétique, il est en mesure d’apporter une dimension nationale au sujet et son expertise en tant que coordinateur de programmes  CEE d’envergure tel que le programme Slime ou Actimmo, et dans l’animation de réseaux d’acteurs pionniers comme les territoires à énergie positive (TEPOS) ou le réseau d’acteurs contre la pauvreté et la précarité énergétique dans le logement (RAPPEL).