Le point sur la planification écologique

Le 25 septembre 2023, le président de la République présentait le plan issu des travaux du Secrétariat général à la planification écologique. Ce plan fixe des objectifs précis, assortis de trajectoires chiffrées afin de réduire fortement nos émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030. Entretien croisé avec Anne Bringault, directrice des programmes du Réseau Action Climat et Damien Demailly, directeur adjoint stratégie et valorisation de l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE).

En quoi consiste la planification écologique ?

Anne Bringault : Ce qui distingue ce plan de ceux qui le précèdent, tels que la stratégie bas carbone, c’est qu’il est porté par Matignon. Il est le fruit d’une approche transversale, de multiples réunions d’arbitrage avec tous les ministères concernés qui ont validé cette planification. 

Damien Demailly : Pour atteindre l’objectif fixé par le paquet climat Européen Fit for 55, à savoir réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) de 55 % d’ici à 2030 par rapport aux niveaux de 1990, la planification écologique identifie les potentiels de réduction secteur par secteur. Elle s’assure de la cohérence des politiques publiques : est-ce que ça boucle entre l’énergie, la biomasse, la biodiversité, la baisse des émissions ? Avec ce plan, l’État partage aussi sa vision de la France de demain.

Comment transformer les intentions en actions concrètes ?

A.B. : Le plan dresse des constats en matière de logement, de transport, d’alimentation, de consommation ou de production… et propose des trajectoires : où en sommes-nous, où voulons-nous aller ? Ainsi, il propose de passer d’un parc actuel de 1% de voitures électriques à 15% en 2030. Mais les moyens législatifs et réglementaires pour y parvenir, comme l’instauration d’un malus poids pour inciter les industriels à proposer des véhicules électriques légers, sont absents. 

D.D. : Le plan est un travail d’ingénieurs, il chiffre des objectifs et identifie des leviers. Il reconnaît que les politiques publiques actuelles ne permettront d’atteindre que 45% de nos objectifs et qu’il nous faudra de nouvelles mesures pour les 55% restants. Ces mesures prendront la forme soit de nouvelles normes réglementaires, soit de modifications de la fiscalité ou d’une augmentation de la dépense publique. En pratique, ces trois leviers vont souvent ensemble. Aujourd’hui, il semble que l’État ne souhaite ni de nouvelles normes contraignantes, ni davantage de taxes. La marge de manœuvre est donc très réduite.

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Comment améliorer ce plan ?

A.B. : Il faut qu’il rentre dans le débat public. Les mesures à mettre en œuvre, nationalement ou localement, doivent être débattues pour mieux répondre aux enjeux de justice sociale, au principe du pollueur/payeur et intégrer davantage la sobriété. 

DD : Le rôle des collectivités locales est central, mais comment leur demander de faire des investissements importants si elles sont dans un cadre budgétaire contraint ? Enfin le financement de l’adaptation aux impacts du changement climatique n’y figure pas, alors même qu’il est impératif d’intégrer le climat de demain dans toutes les politiques publiques. Mais le plan n’est pas un document figé. C’est une stratégie vivante avec des outils de suivi qui permettent des ajustements.

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