Fit for 55 : le point sur les directives énergétiques

Pour réduire les émissions nettes de gaz à effet de serre d'au moins 55 % d'ici à 2030 l’Europe est en train d’adopter un paquet de mesures législatives : le paquet Fit for 55. Parmi celles-ci les directives sur la performance énergétique des bâtiments, l’efficacité énergétique et les énergies renouvelables. Le point avec Caroline François-Marsal, Responsable Europe au Réseau action climat.

Sur quoi portent les révisions des directives sur l’énergie du paquet Fit for 55 ?

Caroline François-Marsal : Le Fit for 55 ou « ajustement à l’objectif 55 » traduit les objectifs climatiques de l’Union européenne en législations. Ces objectifs, fixés en 2021 par la Loi européenne sur le climat, ont été revus à la hausse lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie dans le cadre de RepowerEU. Avec Fit for 55, le Parlement européen, la Commission et les États membres de l’UE se sont finalement entendu sur un objectif juridiquement contraignant qui porte la part des énergies renouvelables dans la consommation d’énergie finale de l’Union européenne à 42,5 % d’ici 2030. Le Parlement souhaitait atteindre les 45% tandis que les ministres de l’Énergie des 27 États membres réunis au sein du Conseil de l’Union européenne, visaient les 40%.

S’il y a lieu de se réjouir, on reste loin du compte : pour maintenir le réchauffement planétaire en dessous de 1,5°C, comme le prévoit l’Accord de Paris, il faudrait 50% d’ENR en 2030. Même constat pour l’efficacité énergétique : le texte adopté demande aux États de l’UE de réduire leurs consommations d’énergie finale de 11,7% pour 2030 : il faudrait atteindre les 20%. Et fonder le calcul sur l’énergie primaire afin de prendre en compte la totalité du cycle de l’énergie produite par rapport aux consommations finales. Enfin ces objectifs ne sont contraignants qu’au niveau européen et non au niveau national. En ce qui concerne la performance énergétique des bâtiments, les négociations sont toujours en cours.

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Quel rôle la France a-t-elle joué dans ces négociations ?

C.F.M. : En matière de performance énergétique des bâtiments, la France joue un rôle moteur, poussant vers des ambitions fortes au niveau européen. On ne peut pas en dire autant pour l’efficacité énergétique où elle défendait la position du Conseil : 9% de baisse de consommation, alors même que la commission préconisait une économie de 13%. La France ne se contente pas de freiner, elle est allée jusqu’à bloquer le vote sur la directive européenne sur les énergies renouvelables. En raison de son engagement en faveur du nucléaire, notre pays a du mal à accepter d’aller au-delà du 40% d’EnR, alors que de nombreux États, dont l’Allemagne, plaidaient pour 45% d’EnR dans le mix énergétique européen en 2030.

Quels changements majeurs ces textes vont-ils avoir ?

C.F.M : La France est particulièrement en retard sur le développement des énergies renouvelables. Seule 19,3% de notre consommation finale est issue des énergies renouvelables en 2021 comparé à une moyenne européenne à 22% et notre pays est le seul État européen à ne pas avoir atteint les objectifs qu’il s’était fixé ! Pour atteindre les 42,5% d’EnR nous allons devoir tripler leur rythme de déploiement. De même, nous devrons réduire plus fortement nos consommations d’énergie. C’est un sujet majeur. Fit for 55 introduit une taxation carbone sur les carburants et le chauffage dès 2027.

Un Fonds social pour le climat pour soutenir les plus vulnérables face à la hausse des prix des combustibles fossiles a été adopté par l’Union européenne. Mais ce fonds est insuffisamment doté et surtout il arrive trop tard pour aider les ménages vulnérables à rénover leur logement ou changer leur véhicule ! Nous risquons une nouvelle crise sociale, comme celle des gilets jaunes.