La transition énergétique sera territoriale… ou ne sera pas
Du 26 au 28 septembre 2018, 450 personnes dont une majorité de représentant.e.s de collectivités pionnières du réseau des Territoires à énergie positive étaient réunies à l’occasion des 8e Rencontres Energie et Territoires ruraux. Depuis Montmélian en Savoie, ils lancent un appel à l’Etat pour qu’il leur accorde une plus grande confiance pour mener à bien la transition et des moyens pour passer à l’action en faveur des économies d’énergie et des énergies renouvelables.
Depuis la démission de Nicolas Hulot, ce n’est plus un secret : la France n’est pas sur la trajectoire qui lui permettrait d’atteindre les objectifs ambitieux de transition écologique définis dans la loi. Faut-il se résoudre pour autant à penser qu’en matière d’écologie, « l’immobilisme est en marche et rien ne pourra l’arrêter » ? Non ! Tous les Territoires à énergie positive (TEPOS) peuvent en témoigner : l’action locale en faveur de la transition écologique a de nombreuses vertus pour le développement économique et la société. 200 000 euros économisés sur dix ans à Malaunay qui a réduit ses dépenses énergétiques, 350 emplois directs et indirects créés à Loos-en-Gohelle en dix ans autour des éco-activités, ou encore 24 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel dans le territoire du Thouarsais grâce aux énergies renouvelables… Ces réalisations empruntent un chemin que nous invitons aujourd’hui le gouvernement à considérer avec plus d’intérêt s’il veut accompagner sincèrement nos efforts venus du terrain.
« L’envie et la puissance d’agir ne viennent pas d’en haut ni seulement d’en bas, mais d’une volonté de faire ensemble »
Car c’est dans les territoires que les enjeux globaux se matérialisent dans le réel et le quotidien, et que peuvent se structurer les réponses concrètes, participatives et opérationnelles qu’il faut y apporter ! L’envie et la puissance d’agir ne viennent pas d’en haut ni seulement d’en bas, mais bien d’une volonté de « faire ensemble » les transitions, en privilégiant le collectif et la confiance. L’implication des acteurs, la construction d’alliances à l’intérieur du territoire et avec les voisins, de nouveaux modèles économiques, de nouvelles solidarités et une gouvernance plus inclusive, plus ouverte, autrement dit à haute qualité démocratique, constituent des facteurs-clés de la réussite et permettent de réconcilier localement l’économique, le social et l’écologique.
Mais les injonctions nationales sèment souvent le trouble
Pourtant les territoires sont trop souvent les réceptacles des politiques publiques de l’Etat aux injonctions contradictoires ou des choix établis par les opérateurs nationaux sans aucune concertation. Tandis que les plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) – assortis d’exigences réglementaires fortes mais d’aucun moyen – sont censés être adoptés partout d’ici la fin de l’année, comment comprendre que le secrétaire d’Etat Sébastien Lecornu ne les évoque qu’avec pudeur pour glisser immédiatement vers la nécessité « d’aller vers des projets plus ambitieux via les contrats de transition écologique » ? Il passe, en outre, sous silence la dynamique des Territoires à énergie positive amorcée dès 2010, appuyée par les appels à projets régionaux et de la Ministre Ségolène Royal, et qui ne cesse de se structurer et de se renforcer.
« Les collectivités locales ont développé leur capacité à se saisir de sujets complexes. L’Etat peut et doit maintenant leur accorder sa confiance »
Avec la dernière réforme territoriale, les collectivités locales ont grandi et développé leur capacité à se saisir de sujets complexes comme celui des transitions. L’Etat peut et doit maintenant leur accorder sa confiance. Il est de sa responsabilité, avec les Régions, d’accompagner les dynamiques de transition partout en France par une intervention coordonnée et efficace de ses services, la mise en place de dispositifs simplifiés et cohérents, et un accompagnement financier donnant aux territoires les moyens d’être des partenaires solides de la réalisation de destins communs.
Le temps de l’engagement et de la coopération est venu
Nous proposons l’attribution d’une dotation climat-énergie pérenne à tous les territoires désireux de s’engager ou de poursuivre les transitions à la hauteur des enjeux afin qu’ils aient une vision claire des moyens dont ils peuvent disposer dans la durée. Cette dotation sera conditionnée à l’établissement d’un contrat avec l’Etat (et potentiellement d’autres partenaires) pour une durée longue (six ans), ainsi qu’à l’atteinte effective des objectifs contractuels et à la mesure des impacts en bonne intelligence avec l’ensemble des services compétents. Le contrat s’appuiera sur le PCAET, s’il existe, pour ce qui concerne le volet énergie-climat, et concourra à en financer les actions.
« Nous appelons l’Etat à mettre en œuvre les moyens d’atteindre les objectifs fixés »
Nous ne pouvons plus regarder ailleurs… et il n’est plus l’heure d’empiler les dispositifs provisoires. Si nous appelons tous les territoires à engager une démarche de transition écologique au niveau local, nous appelons réciproquement l’Etat à mettre en œuvre les moyens d’atteindre les objectifs fixés. Cela passe par une coopération renforcée avec les territoires, les entreprises et les citoyens pour engager une démarche globale cohérente, inscrite dans le temps et seule capable de faire enfin bouger les lignes… et les courbes.
Les premiers signataires de cet appel sont :
Jacky AIGNEL, maire du Mené
Patrick BARBIER, maire de Muttersholtz
Vincent BEILLARD, vice-président de la communauté de communes Crestois Pays de Saillans
Patrick BENOIST, vice-président de la communauté de communes Maremne Adour Cote Sud
Jean-Marc BOUVIER, vice-président de la Communauté de communes du Val de Drôme en Biovallée
Jean-François CARON, maire de Loos-en-Gohelle
Bernard CHAVEROT, vice-président à la transition énergétique et son binôme Philippe GARNIER de la Communauté de communes des Monts du Lyonnais
Guillaume COUTEY, maire de Malaunay
Michel DUCHAMP, vice-président de la Communauté de communes sud Côte Chalonnaise
Sébastien EYRAUD, maire de Laval
Jérôme FAUCONNIER, président de la Communauté de communes du Trièves
Jean-Pierre GOUDARD, vice-président de la Communauté d’agglomération de l’Ouest Rhodanien
Jean-Marie HAAS, Président de la Communauté de communes Sauer-Pechelbronn
Pascal MASSICOT, président de la Communauté de communes de l’île d’Oléron
Michel MAYA, maire de Tramayes
Bruno NOURY, maire de l’Ile d’Yeu
Jean-Marie OUDART, vice-président de la Communauté de communes des Crêtes pré-ardennaises
Agnès PIGNATEL, maire du Lauzet-Ubaye
Thierry RESTIF, vice-président de Roche aux Fées Communauté
Béatrice SANTAIS, présidente de la communauté de communes Cœur de Savoie
Martine SCHWARTZ, vice-présidente de la Communauté de Communes de la Vallée de Kaysersberg
Didier SOMEN, président du Pôle territorial de l’Albigeois et des Bastides
ainsi que :
Sandrine BURESI et Marie-Laure LAMY, co-présidentes du CLER
Mélodie DE L’EPINE et Alenka DOULAIN, co-présidentes d’Energie Partagée
Bertil DE FOS, directeur d’Auxilia
Vincent LEGRAND, gérant de l’Institut négaWatt
Bruno REBELLE, directeur général de Transitions
Tous membres du réseau des Territoires à énergie positive (TEPOS)
ainsi que :
Christophe BOUILLON, Député de Seine Maritime, Maire honoraire de Canteleu, Président de l’Association des Petites Villes de France (APVF)
Grégory BONNET, Maire de Montcel (63)
Vincent POIZAT, Conseiller municipal de Rueil-Malmaison
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