Quelle place pour les femmes dans la transition énergétique ?
Le 8 mars est la journée internationale du droit des femmes. C’est l’occasion de s’interroger sur la place des femmes dans le secteur de l’énergie.
L’énergie, un monde d’hommes ? La question est simple et la réponse est sans appel. « Dans le monde, le secteur de l’énergie dans son ensemble ne compte que 30 à 20% de femmes. C’est l’un des domaines de l’économie où les inégalités de genre sont les plus marquées, avec le secteur de l’informatique et celui de l’industrie » indique Béatrice Delpech, directrice générale adjointe du réseau coopératif Enercoop qui a récemment consacré un webinaire à ce sujet à l’intention de ses adhérents et du grand public. Certes, il y a globalement plus de femmes dans les énergies renouvelables que dans le segment pétro-gazier. Mais, même là, elles comptent pour moins d’un tiers des effectifs ! »
Une sous-représentation dans les instances de décision
Par ailleurs, les femmes apparaissent majoritairement concentrées dans les fonctions support et demeurent assez rares dans les métiers scientifiques et techniques, sans parler des instances de gouvernances où elles sont remarquablement sous-représentées. La faute aux stéréotypes de genre bien ancrés dans des siècles de patriarcat, plus encore dans un secteur énergétique culturellement lié aux structures du pouvoir et de la domination. « Les femmes ne décident pas du futur énergétique alors même qu’elles sont les premières à le subir, résume Béatrice Delpech, membre du conseil d’administration du CLER-Réseau pour la transition énergétique. En effet, sur les 11% de citoyens européens qui souffrent de précarité énergétique, la majorité sont des femmes. »
Repenser la question
Changer la donne ? C’est indispensable, mais loin d’être facile : malgré la libération de la parole féministe et les politiques de quotas, la place des femmes ne progresse que très lentement. Pour aborder cette question, Sandrine Holin, auteure de Chères collaboratrices propose d’élargir les perspectives. « Pour arriver à une société plus égalitaire dans le secteur de l’énergie, il ne suffit pas de changer les structures de travail mais aussi de changer de manière globale la structure du système énergétique, affirme-t-elle. Ce dernier est un choix de société capitaliste, un choix de concentration des moyens de production dans les mains d’une minorité. »
Transformer les imaginaires
Pour sa part, de par son positionnement de coopérative radicale de la transition, Enercoop agit pour une transition socialement juste à travers de nombreuses initiatives qui débordent largement de son cœur d’activité. « Les onze SCIC de notre réseau sont mobilisées sur la question de la place des femmes mais nous ne pouvons pas crier victoire, poursuit Béatrice Delpech. Deux-tiers des sociétaires sont des hommes et les conseils d’administrations sont encore très masculins. » Toutefois, les signaux encourageants sont là : le comité de direction d’Enercoop national est strictement paritaire, l’égalité salariale progresse et toutes les structures s’efforcent maintenant d’augmenter la part des administratrices dans leurs CA pour tendre vers la parité à court terme. « Mais ne rêvons pas, ajoute Sandrine Holin en conclusion. Les coopératives ne transformeront pas le monde à elles-seules. C’est la société toute entière qu’il faut changer en faisant émerger de nouveaux récits qui transforment les imaginaires… »