Un territoire engagé en faveur de la rénovation de l’habitat

La Normandie a su mobiliser un écosystème d’acteurs pour garantir aux citoyens un accompagnement de qualité dans la rénovation énergétique. Dans le cadre du déploiement du Service public de la rénovation de l’habitat (SPRH), elle poursuit son action pour assurer une continuité des dynamiques locales.

La première pierre est posée en 2008 avec la mise en place du Chèque Eco-Énergie en Basse-Normandie. Un dispositif d’aide destiné à massifier la rénovation performante des logements, visant le niveau « bâtiment basse consommation » (BBC) ou BBC compatible. « Les politiques nationales qui s’appliquaient sur le territoire étaient  étanches entre elles. Les Espaces Info Energie (EIE) étaient portés par l’Ademe, tandis que la politique de l’Anah se traduisait par la mise en œuvre des opérations programmées d’amélioration de l’habitat », explique Alain Deffontaines, chef de service bâtiments durables de la Région Normandie. « Nous avons regroupé ces deux réseaux de conseillers sous l’appellation Conseil Habitat & Energie. » Très vite, la Région structure une filière de « rénovateurs BBC » conventionnés. Elle met aussi banques et co-financeurs dans la boucle pour construire un écosystème de la rénovation énergétique. Car au plan national, une nouvelle étape est franchie en 2015 avec la création du Service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH), un service de proximité offert à tous les citoyens. En 2016, avec la fusion des deux régions, le Chèque Eco-Énergie est étendu à l’ensemble du territoire. Un soutien complet aux ménages est formalisé par le plan d’action « Normandie bâtiments durables ». Depuis, 163 millions d’euros ont été débloqués pour soutenir la rénovation performante des bâtiments toutes cibles confondues.

La Région, porteur associé du SARE

Un point de bascule intervient en 2018 avec le déploiement des Espaces Conseil FAIRE et du programme SARE, financé par des certificats d’économie d’énergie (CEE) et les collectivités. La Région joue alors un rôle moteur pour convaincre les collectivités de prendre en charge ces nouveaux guichets destinés à faciliter, accompagner et informer les citoyens pour leurs travaux de rénovation énergétique. 14 intercommunalités sur 70 acceptent. C’est le cas de la Métropole Rouen Normandie. « Nous avions un Espace Info Énergie sous doté, avec trois conseillers pour 500 000 habitants », informe Cédric Delahais, responsable du service Stratégie de la transition énergétique de la Direction de la transition énergétique. Fin 2019, la Métropole adopte son Plan Climat-Energie Territorial, avec l’ambition de rénover 100% des logements avec un niveau de performance énergétique équivalent au niveau « BBC rénovation » en 2050. Energies Métropole Rouen Normandie, le service public de la transition énergétique est créé. « La Direction de la transition énergétique a été structurée pour piloter ce service public et le doter d’une ingénierie d’accompagnement sur le territoire », retrace Cédric Delahais. La Métropole fait émerger une nouvelle structure, la société publique locale Agence Locale de la Transition Energétique Rouen Normandie (SPL Altern). Son rôle ? « Être la porte d’entrée, le guichet unique sur le volet énergie », résume l’ingénieur. Une équipe est dédiée aux copropriétés de taille moyenne, tandis que six conseillers accompagnent tous types de ménages. « Nous conseillons sur la technologie la plus adaptée, sans influence sur le choix de l’entrepreneur », indique Jean-Christophe Boclet, le directeur général de la SPL Altern. « Notre objectif, c’est d’inciter les ménages à aller vers la rénovation globale en cumulant les aides de l’Anah, de la Région, de la Métropole et du département. » En cas de difficulté juridique, architecturale ou urbanistique, la SPL Altern peut solliciter l’ADIL 76 ou le CAUE. « Cela permet d’avoir un accompagnement multi-thématique », précise Cédric Delahais.

Mailler l’intégralité du territoire

« Dans chaque département, pour les territoires non pris en charge par un EPCI, un groupement composé d’anciens Espaces Info Énergie et d’opérateurs Anah a été retenu pour porter ces Espaces Conseil FAIRE », décrit Alain Deffontaines. Dans le Calvados, c’est Biomasse Normandie qui endosse ce rôle. Le service est financé par la Région, les CEE et les collectivités. « Ce qui guide notre accompagnement, c’est l’approche technique avant tout, avec la volonté d’emmener le ménage vers une rénovation plus impactante en termes de réduction des consommations d’énergie, d’efficacité et de qualité des matériaux utilisés », souligne Marie Guilet, sa directrice. Pour rénover sa maison, Julien a fait appel à Biomasse Normandie : « Notre conseiller nous a accompagné pour l’audit énergétique, sur la partie financière et la gestion des dossiers d’aides. Nous avons aussi bénéficié d’une expertise technique et eu accès à un annuaire d’artisans agréés. » Le Club normand des rénovateurs BBC réunit à ce jour 170 entreprises de travaux et une filière d’auditeurs énergétiques.

Vers un service public universel

En 2021, la loi « climat et résilience » fait évoluer le Service public de la performance énergétique de l’habitat (SPPEH) qui devient le Service public de la rénovation de l’habitat (SPRH). Un service public de la rénovation de l’habitat au périmètre élargi à toutes les thématiques d’amélioration de l’habitat (énergie, autonomie, habitat indigne). Dans le prolongement des Espaces Conseil FAIRE, les Espaces Conseil France Rénov’ (ECFR) deviennent les guichets de référence. Le dispositif Mon Accompagnateur Rénov’ (MAR’) est introduit. Cet opérateur agréé par l’Anah accompagne les particuliers de bout-en-bout dans leur projet de rénovation. « En Normandie, 90% des MAR’ sont les opérateurs historiques : conseillers France Rénov’ ou opérateurs Anah. La Région anime et finance le réseau », complète Alain Deffontaines. À ce titre, Biomasse Normandie compte désormais neuf conseillers pour assurer les permanences France Rénov’ et les missions MAR’.

Ce schéma devrait perdurer jusqu’à fin 2024. Un nouveau chapitre post-SARE va s’ouvrir avec la mise en place des Pactes territoriaux France Rénov’ pour la mise en oeuvre du service public de la rénovation de l’habitat. Au plan local, les discussions battent leur plein. Si son pilotage incombera à la DREAL, la Région Normandie s’est engagée à soutenir la rénovation énergétique jusqu’en 2027 dans le cadre d’une convention avec l’Anah. Le déploiement opérationnel du SPRH pose surtout la question de l’implication et du cofinancement des collectivités infrarégionales destinées à être signataires des pactes territoriaux. « Il y a de fortes chances que nous ayons des Pactes dérogatoires portés par les Espaces Conseil France Rénov’ associatifs, financés par les EPCI, la Région et l’Anah », signale Alain Deffontaines.

À la Métropole, les directions se coordonnent pour construire le SPRH. « Côté Énergie, c’est plutôt une massification de la rénovation énergétique pour tout type de public qui est visée, tandis que dans le cadre du Programme Local de l’Habitat, nous sommes sur des aspects plus sociaux. Massifier oui mais n’y a t-il pas une priorité à aider les plus modestes ? Nos élus vont arbitrer », formule Jocelyne Grignoux, responsable des politiques locales de l’Habitat. « L’écriture de ce Pacte nous oblige à rapprocher nos politiques. Il y a un enjeu à ce qu’on partage la même culture. Le but, c’est d’embarquer tous les partenaires pour aller vers ce SPRH », conclut Cédric Delahais.