Communautés énergétiques : la France fait l’impasse sur les objectifs

La France doit intégrer 44% d’énergies renouvelables dans sa consommation brute finale d’énergie d’ici à 2030. Pour accélérer, elle doit promouvoir les communautés énergétiques. Son plan énergie-climat est-il à la hauteur ? Éléments de réponse avec Etienne Charbit, responsable Europe au réseau Cler.

La France vient de soumettre à la Commission européenne la version finale de son plan national intégré énergie-climat (PNIEC). Bruxelles avait déjà évalué son premier jet rendu en novembre 2023. Le bilan est sans appel : la France est le seul pays européen à ne pas avoir atteint ses objectifs de déploiement d’énergies renouvelables (EnR) en 2020. Le pays doit rehausser ses objectifs pour atteindre 44% d’EnR dans sa consommation brute finale d’énergie d’ici à 2030.

Cumul des retards

« La France n’essaye pas vraiment de rattraper son retard puisque le seuil des 23% d’énergies renouvelables dans sa consommation finale brute énergétique n’a toujours pas été atteint », avertit Etienne Charbit. Avec seulement 19,1%, elle a raté le coche. « La France, pour des raisons politiques, ne veut pas afficher d’objectif pour 2030 en matière d’énergies renouvelables dans son plan. Elle se fixe un objectif de 58% d’énergie décarbonée dans son mix énergétique, mais cela inclut le nucléaire. » Pour le réseau Cler, l’objectif doit être indiqué noir sur blanc dans le plan national intégré énergie-climat dans le respect de la directive sur les énergies renouvelables du 18 octobre 2023. Cet acte juridique fixe un niveau contraignant à atteindre : 42,5% d’énergies renouvelables dans le mix énergétique européen. Le non-respect de ses engagements expose la France à une sanction financière et au gel de fonds européens. « Atteindre cet objectif ambitieux va demander une accélération drastique sur les énergies renouvelables. Il faut une volonté politique affichée pour encourager la filière et une planification adéquate », estime Etienne Charbit. S’il reconnaît les efforts menés sur l’éolien offshore, il rappelle la nécessité de fixer des objectifs plus ambitieux sur l’éolien terrestre. « Pour qu’il y ait un développement harmonieux des énergies renouvelables, il faut que tous les types d’énergies renouvelables soient développés. ».

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Le cap à tenir

Pour accélérer, la France doit soutenir les communautés énergétiques. La Commission demande aux États membres d’encourager davantage ce type de projets citoyens. La transposition de la précédente directive sur les énergies renouvelables dans le droit français fin 2023 constitue une avancée, tout comme le soutien de l’État au développement des communautés énergétiques via des bonus dans les appels à projets. « Un cadre est mis en place pour favoriser leur déploiement, mais le plan national intégré énergie-climat échoue à mentionner des mesures supplémentaires de soutien et d’accompagnement concrètes », développe Etienne Charbit. « La définition légale est un peu complexe et restrictive. Nous nous interrogeons sur le fait que cet outil soit réellement mobilisé par les citoyens et acteurs de l’énergie renouvelable », formule-t-il. Le cadre fixé doit être en synergie avec l’écosystème d’acteurs déjà structuré sur le territoire. En 2021, le ministère de la Transition écologique a publié un plan d’action pour les énergies citoyennes et renouvelables. « Ce document prévoyait un objectif de 1 000 nouveaux projets d’énergies renouvelables citoyennes entre 2021 et 2028. Or, rien dans le plan national actuel ne va dans ce sens », déplore-t-il. Fixer des objectifs ambitieux est indispensable ! »