Sobriété énergétique : un groupe de réflexion au CLER

De nombreux acteurs, et adhérents du CLER, continuent de co-construire les conditions locales de la transition vers des modes de vie plus sobres. En déployant des programmes de sobriété comme Déclics, ou en accompagnant les collectivités et les particuliers dans leurs transitions, ils participent à ouvrir des champs d’expérimentation et à tracer les perspectives d’un vivre-ensemble soutenable. Nous leur proposons aujourd'hui de nous rejoindre au sein d'un groupe de réflexion sur le sujet.

L’épisode récent du confinement de plus de la moitié de la population mondiale et du ralentissement forcé de l’activité économique pour cause de pandémie, aura pointé une fois de plus, et de façon dramatique, l’impasse sociale et environnementale dans laquelle nous nous trouvons aujourd’hui. Elle aura également contribué à mettre ou remettre en lumière les arguments et points de vue critiques de chercheur·ses et d’une partie de la société civile à l’encontre d’un modèle de développement à bout de souffle, et qui appellent avec force et conviction la transformation vers un horizon écologiquement soutenable, socialement juste, et énergétiquement sobre.

Amorcer le virage vers une société plus sobre

En 2019, le réseau du CLER recevait lors de son assemblée générale l’économiste Eloi Laurent et la politologue Mathilde Szuba. Le premier exhortait alors les acteurs de la transition énergétique à sortir définitivement de la mythologie économique du PIB et à valoriser les co-bénéfices sanitaires et sociaux de la transition énergétique plutôt que de plaider pour une compatibilité avec le modèle de croissance. La seconde rappelait que, dans l’histoire récente, des sociétés confrontées à la pénurie des chocs pétroliers avaient su repenser leur quotidien pour s’adapter à un mode de vie collectif nécessairement plus sobre. Elle concluait sur l’idée que le principe de justice sociale constitue certainement la clé de voûte d’un contrat social et environnemental renouvelé.

Plus récemment, l’imposant ouvrage Abondance et liberté du philosophe Pierre Charbonnier dépliait l’histoire de la relation organique qui lie les sociétés démocratiques avec la notion d’abondance et l’exploitation infinie des ressources naturelles, et plaidait pour une sobriété démocratique, c’est-à-dire une société qui réussisse à sortir de l’illusion d’une croissance matérielle illimitée et pose comme fondement les conditions politiques de la soutenabilité sociale et écologique.

« Des trois piliers de la démarche Négawatt, la sobriété est certainement le plus difficile à circonscrire »

Dans le même temps, le livre du sociologue Razmig Keucheyan Les besoins artificiels abordait la question de la profusion matérielle des sociétés post-industrielles, et des enjeux politiques et sociaux de sa régulation. Dans sa conclusion, il cite des expérimentations inspirantes, comme celle du sociologue et philosophe Bruno Latour (dont les propositions parues durant le confinement ont entraîné de nombreuses réactions dans le réseau), et rappelle que des propositions concrètes existent déjà pour amorcer le virage vers une société plus sobre, comme le scénario Négawatt et les déclinaisons qu’il propose du principe de sobriété comme initiateur de la démarche de transition énergétique (sobriété dimensionnelle, coopérative, d’usage). Mais, s’il mobilise ces travaux, c’est également pour en souligner les limites, notamment lorsqu’il s’agit de traduire leurs préconisations dans le détail et la complexité des modes de vie, et de penser leurs modalités politiques concrètes de mise en œuvre. Des trois piliers de la démarche Négawatt (avec l’efficacité énergétique, et les énergies renouvelables), la sobriété est certainement le plus difficile à circonscrire, et qui impose de déconstruire nos représentations et nos habitudes pour prendre la mesure du chantier politique qu’il ouvre.

Expérimenter des actions et des politiques de sobriété

On peut voir dans l’installation et les travaux de la convention citoyenne pour le climat un embryon de ce que supposerait comme débats et exercices de consensus la transformation démocratique de notre modèle de développement. La notion de sobriété est revenue depuis quelques années dans les débats sur les conditions de faisabilité de la transition énergétique. Cela s’illustre dans les actes, en témoigne le travail mené sur plusieurs territoires (Grand-Douaisis, Ardèche, Clunisois) par Virage Énergie avec les collectivités et leurs partenaires, ou dans la recherche, avec la création dès 2017 du réseau international ENOUGH. La crise économique annoncée par la pandémie de COVID-19 nécessitera d’adapter nos logiciels, et offrira certainement les conditions pour expérimenter des actions et des politiques de sobriété.

C’est dans ce sens que les équipes du CLER et de Virage Energie, souhaitent rendre plus visibles les initiatives et les expériences de sobriété sur le territoire, et vous proposeront avant l’été de nous rejoindre pour initier un groupe de réflexion dédié à la thématique.

Contact

Julien Camacho

Responsable de projets Sobriété
Coordinateur du programme Déclics

julien.camacho[arobase]cler.org