Rénovation énergétique et Caisse des dépôts : des propositions qui manquent d’efficacité

Une nouvelle Caisse des dépôts et « du développement durable » ? Les nouvelles dotations financières accordées à la rénovation énergétique, annoncées par le chef de l’Etat le 12 janvier 2016, ne suffiront probablement pas à faire de la Caisse des dépôts et consignations (CDC) « l’opérateur de la transition énergétique » français.

Outils, gouvernance, articulation de l’action de cette institution avec les acteurs territoriaux… N’attendons pas encore 200 ans pour faire émerger un vrai marché de la rénovation énergétique en France !

La transition énergétique passe par des bâtiments publics et privés plus économes en énergie. Cet enjeu, à la fois écologique, social et économique, est considérable. Un mois après la COP 21, les déclarations de François Hollande à l’occasion du bicentenaire de la CDC, montrent l’importance accordée à la rénovation thermique du bâti dans la lutte contre le réchauffement climatique. Mais la mobilisation d’une enveloppe supplémentaire de 3 milliards d’euros d’ici 2017, à destination des logements sociaux et de la politique de rénovation thermique, ne doit pas occulter la vraie question de fond dans ce débat : quelle rôle la CDC doit-elle jouer dans l’émergence d’un marché français de la rénovation énergétique ?

Que financera cette agence ?

Une moitié de cette enveloppe financière sera investie sous forme de prêts à long terme et à taux nul pour la rénovation des bâtiments publics. Ils couvriront 100 % des besoins des emprunteurs (collectivités locales, universités, hôpitaux…) pour financer leurs projets. Cela donnera naissance à une nouvelle filiale dédiée de la CDC, qui deviendra l’opérateur national de la rénovation thermique des bâtiments. Les contours d’une telle « agence » reste largement à préciser. Pour qu’elle soit pleinement engagée en faveur de la transition énergétique, celle qui pourrait être renommée « Caisse des dépôts et du développement durable » devra avoir un positionnement clair lui permettant de soutenir les initiatives des territoires et non de les concurrencer. Une telle agence doit avoir pour objectif, à l’image de la KfW allemande, de connecter les projets de transition énergétique de nos territoires et les flux financiers européens et mondiaux.

Des euros à taux zéro

La nouvelle enveloppe financière devrait également être consacrée pour moitié à la fourniture de prêts à taux zéro pour les organismes de logements sociaux sur des durées de 20 ans. Ils devraient permettre, selon le chef de l’Etat, à la fois la construction de près de 50 000 nouveaux logements et la rénovation thermique des logements existants (à travers des travaux d’isolation thermique par exemple). Reste que les collectivités, de même que l’Etat, sont très endettées : la demande risque donc de ne pas suivre. Pour dépasser ce blocage, la réponse est ici européenne : les règles de comptabilité doivent être modifiées de manière à ne pas compter comme une dette publique les investissements réalisés dans l’efficacité énergétique car ils génèrent directement des économies, sur les charges d’exploitation des bâtiments ou en éclairage public.

Incitons aussi les particuliers

Enfin la grande absente du discours de François Hollande : la rénovation énergétique des logements privés. Alors que la loi de transition énergétique prévoit la remise d’un rapport sur la simplification des aides à dédier aux particuliers, rien ne semble prévu en la matière du côté de la Caisse des dépôts et consignations qui reste « en dehors du coup ». Alors que le levier principal français demeure le crédit d’impôt transition énergétique (le CITE dont le CLER soulignait les biais dès sa création en 2014) dont l’effet de levier est de 4 (pour un euro d’argent public investi, 4 euros le sont du côté privé), celui du système allemand de la KfW atteint les 10. Le consommateur reste face à un système complexe et peu efficace. Il faut donc créer les conditions d’un marché incitatif et fiable de la rénovation énergétique.