Aux Fermes de Figeac, « nous disposons aussi de soleil et de vent ! »
La coopérative agricole des Fermes de Figeac emploie 160 salariés et remplit une mission de développement local chère à Dominique Olivier, son directeur. Selon lui, l'innovation est « indispensable pour maintenir la vie sur notre territoire » et multiplier les projets porteurs de sens, au profit des habitants.
D’où vient votre coopérative ?
Elle a été créée en 1985 pour regrouper un millier d’éleveurs bovins et laitiers exerçant dans un rayon de 20 kilomètres. A l’époque, la densité agricole dans cette partie montagneuse du Lot était plus forte qu’aujourd’hui. Il s’agissait surtout de mutualiser l’achat d’intrants et d’aliments mais je crois que nous avions déjà compris que l’innovation et les nouveaux projets étaient indispensables pour maintenir la vie sur notre territoire.
Aujourd’hui, la coopérative est classée parmi les trente premières entreprises du département. Imaginiez-vous un tel résultat ?
Non ! C’est le fruit de trente années de travail sans relâche pour chercher de la valeur sur le territoire que nous occupons. Au début, nous étions une coopérative agricole avec une vingtaine de salariés. Aujourd’hui, nous sommes une coopérative de territoire avec 160 salariés. Ce développement n’est pas inné. Nous voyageons beaucoup, en France et à l’étranger, pour aller voir des porteurs de projets. Tous les trois ou quatre ans, nous menons aussi une réflexion de fond pour réfléchir à l’avenir. En 2008, nous avons bénéficié d’un travail de prospective sur l’horizon 2020. L’étude soulignait que nous n’étions pas un territoire limité à la viande et au lait. Nous avions aussi du soleil et du vent qui pouvaient être sources de richesse.
Quels sont les projets d’énergies renouvelables locales que vous avez entrepris ?
C’est un des volets importants de nos activités. Figeac accueillera d’ailleurs les journées des Territoires à énergie positive (Tepos) en septembre. Notre service énergie compte douze salariés qui font de l’ingénierie et mutualisent l’achat et la maintenance d’installations. La coopérative gère 400 toits photovoltaïques. En cas de panne, un agriculteur seul devrait patienter plusieurs jours avant qu’un technicien ne se déplace. Chez nous, le technicien est salarié ce qui lui permet d’intervenir chez nos adhérents dans les quatre heures et d’éviter que les panneaux photovoltaïques cessent de produire. Il y a moins de pertes d’électricité et donc plus de revenus !
Depuis juin 2016, nous avons aussi un parc éolien financé à 40 % par les citoyens. 183 personnes ont investi. Parmi eux, 25 jeunes salariés du coin, payés au SMIC ou presque, se sont fédérés pour convaincre les banques de leur prêter 300 000 euros à placer dans le projet. Nous avons aussi un ingénieur qui travaille depuis trois ans sur des projets de méthanisation. Une quarantaine d’agriculteurs ont formé des groupes de six ou sept pour financer les installations. Trois projets devraient voir le jour prochainement.
« Tous les matins, il faut se reposer les questions de fond : pourquoi sommes-nous là et quelle est notre mission ? »
Vous avez aussi des projets d’économie sociale et solidaire.
La coopérative a contribué au lancement d’un Pôle territorial de coopération économique (PTCE) qui regroupe 80 structures comme un IUT, un ESAT ou l’association Regain qui gère des recycleries. Ce PTCE va nous permettre de travailler sur des sujets d’économie sociale et solidaire sur lesquels nous ne pourrions pas agir seuls. Nous envisageons d’acheter des voitures électriques ou de lancer une légumerie dans laquelle les pommes de terre seraient transformées en frites et les carottes en purée. Nous, nous savons installer des maraîchers. En revanche, nous ne sommes pas experts de l’insertion par le travail. Nos confrères qui travaillent sur le handicap pourraient s’occuper de ce volet.
Comment les Fermes de Figeac ont-elles permis au territoire de se développer ?
Notre petite ville comptait 1500 emplois il y a dix ans. Aujourd’hui, il y en a 2500. Le chômage est faible mais nous cherchons toujours comment aider l’installation de jeunes agriculteurs. Les services, l’industrie et l’agriculture doivent réfléchir ensemble. Pour faire venir des ingénieurs, il faut des commodités, d’où l’ouverture d’une crèche grâce au PTCE il y a un an. Tout est lié ! Jusqu’à aujourd’hui, les banques nous suivent parce que nous ne nous sommes jamais trompés. Demain, cela pourrait changer… Tous les matins, il faut se reposer les questions de fond : pourquoi sommes-nous là ? Quelle est notre mission ? Cela serait plus facile de faire du commerce extérieur en vendant notre engrais ailleurs. Mais ce n’est pas notre but ! Quand les agriculteurs partent à la retraite, leurs enfants reprennent le flambeau. La coopérative ne nous appartient pas, elle appartient au territoire.
Propos recueillis par Claire Le Nestour pour le CLER Infos N°114 – Transition énergétique : changer de société pour vivre mieux.
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