Les entreprises prennent aussi le virage de la sobriété

Les entreprises, elles aussi, évoluent : certaines réinventent leur modèle économique en limitant leurs impacts sur l’environnement. Pour Julia Faure, cofondatrice de la marque de vêtements Loom, la transition énergétique du secteur textile passe forcément par une sobriété radicale : produire moins, consommer moins.

Quel est le point de départ de l’aventure Loom ?

J.F : Avec mon associé, nous faisons partie de la génération marquée par l’effondrement du Rana Plaza et l’urgence du changement climatique. Quand nous avons créé Loom en 2016, nous rêvions simplement de proposer une marque avec le meilleur rapport qualité prix, écoconçue, peu émissive et éthique.

Aujourd’hui, êtes-vous toujours dans le même état d’esprit ?

J.F. : À force de visiter des usines, nous avons fini par comprendre que la sobriété énergétique et matière, l’efficacité énergétique, le recours aux énergies renouvelables ne constituaient qu’une partie de la solution. Poussés par leurs valeurs ou plus prosaïquement par leurs enjeux de rentabilité, la plupart des industriels du textile ont adopté des pratiques bien plus économes en énergie qu’auparavant, les matières recyclées ont le vent en poupe… et pourtant les impacts environnementaux de l’habillement n’ont jamais été aussi violents. 

Comment expliquez-vous ce paradoxe ?

J.F. : Parce qu’on produit toujours plus. Si vous fabriquez six fois plus de t-shirts, vous aurez six fois plus d’émissions et si vous parvenez à rendre votre chaîne de production moins émissive – vous aurez tout de même plus d’émissions. Actionner le levier de l’énergie c’est important – et nous nous efforçons d’être toujours plus exigeants sur ce point avec nos partenaires – mais c’est insuffisant. Notre priorité : la sobriété, en fabriquant peu de vêtements. Et ça marche. Loom est rentable. 

Mais est-ce que de petits acteurs peuvent contribuer à changer la donne ?

Nous avons co-créé le mouvement “En Mode Climat” pour faire un lobbying vertueux et persuader l’ensemble du secteur textile de tirer un trait sur le modèle dominant d’un accroissement permanent de la production et de la consommation. Cette coalition compte aujourd’hui 400 marques de toutes tailles. Nous demandons à changer les lois pour favoriser les pratiques vertueuses – relocalisation des industries textiles, développement du réemploi, de la réparation et du recyclage. Et surtout pour taxer les pratiques néfastes comme les importations de textile en provenance de pays dont les énergies sont plus fortement émettrices en en GES ou les incitations à la consommation. Nous avons récemment lancé une pétition sur change.org pour demander à Barbara Pompili d’agir en ce sens et le nombre de signatures est porteur d’espoir. 

“Tirer un trait sur le modèle dominant du toujours plus”
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