Énergies renouvelables : un projet de loi trop timide
Réunis en commission mixte paritaire, députés et sénateurs ont adopté, le 24 janvier 2023 la version finale du projet de loi relatif à l'accélération de la production d'énergies renouvelables. Le point sur ce texte avec Anne Auclair, responsable de projets énergie et territoires et Léa Le Souder, responsable de projets énergies renouvelables.
L’examen en chambre mixte paritaire (CMP) a-t-il modifié la place dévolue aux collectivités ?
Léa Le Souder : Le nouveau texte de la loi énergies renouvelables révisé par la CMP a été publié vendredi 27 janvier à 20h30. Il ne présente pas de changement majeur par rapport au pouvoir décisionnaire accordé aux maires pour déterminer les zones d’accélération, ou d’exclusion des énergies renouvelables. Ces zones d’exclusion ne peuvent être fixées que si la commune a identifié une zone d’accélération pour l’implantation de projets énergies renouvelables. Si la loi indique sur quels critères peuvent être définies ces zones, ceux-ci semblent assez légers et largement ouverts à l’interprétation. Enfin, elle ne fixe pas non plus de ratio entre zones à développer et zones à exclure…
Quels sont les principaux manques du texte ?
Anne Auclair : Ce qui est décevant, c’est l’absence totale de référence à l’ingénierie territoriale nécessaire pour accélérer le déploiement des énergies renouvelables, en particulier dans les communes rurales. La loi porte sur de grands principes d’action, sans mettre en face de moyens, ni même d’obligation. Comme toujours, les plus volontaires passeront à l’action mais il n’est pas certain que cela incite les autres, d’autant que le sujet est complexe et que la loi d’accélération ne s’accompagne pas réellement de simplification : son texte demeure très aride. Si le titre du projet de loi évoque l’accélération, tout son contenu porte en fait sur la maîtrise. Comme si on avait du mal à lâcher le frein…
L.L.S. : Le texte manque clairement d’ambition, on sent qu’il est le fruit de nombreux compromis. Le manque de moyens, d’obligations, d’accompagnements ou d’objectifs réalistes font courir à cette loi d’accélération le risque de rater son objectif. Il n’est pas réaliste de fixer aux communes un délai de six mois à compter de la publication de la loi pour définir les zones d’implantation des projets. Cela ne pourra pas être fait de manière satisfaisante. Enfin, la question de l’appropriation citoyenne des énergies renouvelables est totalement absente du texte.
Y-a-t-il malgré tout des avancées ?
A.A. : Le projet de loi met sur le papier des choses qui existent déjà, sans apporter le coup d’accélérateur ni la souplesse attendus. L’installation de panneaux photovoltaïques en toiture, sur les parkings, dans les zones délaissées est facilitée. Pour le reste, cela reste très timide. Un des articles « contribution au partage territorial de la valeur » demande un retour financier des porteurs de projets pour financer la transition écologique du territoire. C’est une bonne chose : cela réaffirme l’importance des énergies renouvelables comme levier de développement économique local. Le financement de la rénovation énergétique, du développement de mobilités propres ou de protection de la biodiversité grâce aux énergies renouvelables est une dynamique déjà largement à l’œuvre dans les TEPOS. Reste à espérer que son inscription dans la loi incite des territoires moins audacieux à développer des projets pour bénéficier des retombées économiques et des bénéficies écologiques locaux !
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