Éco-conception : face aux pressions des industriels, l’Europe doit rester ferme

Des grands groupes profitent de la crise sanitaire actuelle pour tenter de repousser ou de suspendre les réglementations en matière d’éco-conception des appareils électroménagers, au nom de la relance économique. La coalition européenne Coolproducts - à laquelle le CLER appartient - se mobilise pour renforcer ces règles communes qui permettront de réduire fortement notre consommation énergétique, et contraindre les industriels à une production plus responsable et respectueuse du climat et de l’environnement.

Frappée de plein fouet par la crise sanitaire et économique du Covid-19, les Etats-membres de l’Union européenne vont devoir tenir le cap : à Bruxelles, les lobbyistes n’ont pas cessé leur travail durant le confinement, et cherchent plus que jamais à démanteler les politiques européennes d’économie d’énergie qui concernent nos appareils ménagers. Des machines à laver et réfrigérateurs aux petits appareils électroniques, ces règles réduisent pourtant notre facture énergétique et permettront bientôt leur réparation. Elles prévoient à la fois de stimuler l’innovation technologique et la durabilité tout en réduisant les coûts pour les ménages et les entreprises.

Pour le CLER – Réseau pour la transition énergétique, la situation actuelle ne doit pas servir d’excuse pour affaiblir les réglementations environnementales. Bien au contraire : « C’est le bon moment pour définir comment la société de demain sera plus résiliente face aux défis à venir, qu’ils soient sanitaires ou climatiques. Cette résilience passe notamment par des produits plus durables, réparables et économes en énergie », estime Jean-Baptiste Lebrun, directeur de l’association.

Le CLER soutient ainsi une lettre, adressée le 29 avril 2020 à la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen. 200 associations ou groupements  européens de défense de l’environnement et favorables à la réparabilité des produits, y appellent l’UE à ne pas reporter ses efforts sous la pression des groupes industriels.

Des demandes de reports injustifiées et inacceptables

La coalition Coolproducts ne sous-estime pas ces menaces qui sont nombreuses : Digital Europe, puissant groupe de pression représentant Apple et d’autres géants des nouvelles technologies, a par exemple demandé à la Commission européenne de retarder la « mise en conformité des nouveaux produits TIC » alors que ces fabricants seront contraints dès l’an prochain de rendre les écrans d’ordinateur et de télévision plus faciles à remplacer et à réparer.

L’association des appareils électroménagers APPLiA a demandé de reporter à 2026 la mise en œuvre des nouvelles exigences en matière d’économie d’énergie pour les machines à laver, les réfrigérateurs et les lave-vaisselle. Bien que ces règles n’entreront pas en vigueur avant 2024, ces fabricants tentent de les repousser à plus tard encore. Le même groupe a également demandé un report de deux ans de l’objectif de l’UE pour la collecte des déchets électroniques, qui a été fixé en 2012 et aurait dû être atteint cette année.

« Retarder encore la mise en œuvre de ces mesures qui vont dans le bon sens aurait un impact très négatif sur la lutte contre le réchauffement climatique »

Autre exemple : la Consumer Technology Association souhaite retarder les exigences en matière d’économie d’énergie pour les chargeurs vendus en Europe – des règles adoptées après un long bras de fer et entrées en vigueur le 1er avril 2020.

Une réglementation nécessaire pour construire une société plus résiliente

La plupart de ces exigences sont injustifiables ! Les fabricants auraient déjà dû atteindre les objectifs fixés pour cette année, et avoir ainsi suffisamment de temps pour se conformer aux lois qui entreront en vigueur dans les années à venir. Pourtant, un document confidentiel a fuité et indique que la Commission envisage déjà de reporter certaines de ces nouvelles règles visant pourtant à donner aux consommateurs de meilleures informations sur la durée de vie des produits.

Retarder encore la mise en œuvre de ces mesures qui vont dans le bon sens aurait un impact très négatif sur la lutte contre le réchauffement climatique : selon la Commission européenne, les nouvelles exigences en matière d’éco-conception permettront à elles seules de réaliser 167 TWh d’économies d’énergie par an d’ici 2030. Cela équivaut à la consommation annuelle d’énergie du Danemark. Ces économies correspondent à une réduction de plus de 45 millions de tonnes d’équivalent CO2 et d’environ 150 euros par ménage chaque année.

Retrouvez cet appel sur le site de la campagne européenne Coolproducts
Contact

Léo Pardo

Responsable de projets au CLER.

leo.pardo[arobase]cler.org