Pourquoi avoir créé un label spécifique à la rénovation de bâtiments à caractères patrimoniaux ?

Angélique Sage : Chez Effinergie, nous encourageons une rénovation globale des bâtiments. C’est dans ce sens que nous avons créé en 2009 le Label BBC Effinergie Rénovation qui valorise les projets exemplaires de rénovation basse consommation et bas carbone. Nous avons toujours eu conscience qu’il y a des freins économiques et techniques à cette approche. Chaque bâtiment a aussi des spécificités dont il faut tenir compte, en particulier lorsqu’il s’agit de bâtiments à caractères patrimoniaux. C’est pourquoi nous avons créé en 2016 un groupe de travail dédié au patrimoine qui a ensuite donné naissance au Label expérimental Effinergie Patrimoine.  

Comment les projets de rénovation ont-ils été évalués ?

A. S. : Nous parlons de label “expérimental” car nous nous sommes rendu compte que contrairement à un label classique, il n’était pas encore possible de rédiger des règles techniques avec des exigences objectives. Nous avons donc demandé aux porteurs de projet de constituer un dossier pour nous expliquer comment ils avaient associé les volets préservation patrimoniale et efficacité énergétique. Puis, en complément du travail de l’organisme certificateur, c’est une commission d’experts en interne qui a évalué s’ils avaient réussi à associer réhabilitation énergétique performante et préservation des bâtiments à caractéristiques patrimoniales. Neuf projets ont finalement été labellisés, auxquels nous avons consacré un guide de retour d’expériences.  

Qui sont les experts en architecture et en patrimoine de cette commission ?

A. S. : Ils sont notamment rattachés à la Fondation du patrimoine, à Sites et cités remarquables de France, à l’Association nationale des architectes du patrimoine, à l’Association nationale des architectes des bâtiments de France, au ministère de la Culture, au CREBA (Centre de ressources pour la réhabilitation responsable du bâti ancien), etc. Ils nous aident à intégrer l’expertise architecture et préservation patrimoniale à nos travaux, à lever les freins, à échanger, et à comprendre que rénovation du patrimoine et efficacité énergétique sont compatibles. 

Quelle place avez-vous accordée au paysage ?

A. S. : Nous avons fait attention à ce qui se passait au niveau de la parcelle, dans l’environnement très proche des bâtiments car c’est là que les porteurs de projet peuvent agir. Une réhabilitation prévoyait par exemple d’enlever tous les arbres dans une cour alors qu’ils apportaient de l’ombre, jouaient sur l’environnement, le confort visuel, etc. D’un point de vue énergétique, il faut prendre en compte l’environnement car il peut générer des masques, c’est-à-dire des ombres qui ont un impact thermique en protégeant du soleil ou en coupant du vent.

Quel est le principal enseignement de cette expérimentation ?

A. S. : Nous avons pris conscience que plutôt que de massifier la rénovation, l’enjeu est de massifier une méthode de travail. Nous avons pu le constater grâce aux éléments demandés dans le dossier. Il s’est avéré qu’assez peu d’équipes projet réalisait un diagnostic patrimonial. C’est ce qui a motivé la publication d’éléments de cadrage dédiés à ce diagnostic. Mais c’est bien un diagnostic global, réalisé par une équipe pluridisciplinaire, qui permet de poser les bases des réflexions sur le projet de réhabilitation. Nous réfléchissons aujourd’hui à des solutions qui nous permettraient de pérenniser le label Effinergie Patrimoine. Des simulations énergétiques sont en cours pour travailler le volet énergétique.