Carbone incorporé : de quoi parle-t-on ?

Le carbone incorporé, ou intrinsèque (en anglais « embodied carbon ») d’un bâtiment désigne les émissions de gaz à effet de serre de ses matériaux et équipements sur l’ensemble de son cycle de vie (extraction, fabrication, transport, assemblage, entretien, remplacement, déconstruction, démolition…). On le distingue du carbone opérationnel, qui renvoie aux émissions liées à l’exploitation et aux usages du bâtiment : chauffage, refroidissement…

Que dit la réglementation ?

La DPEB révisée, approuvée le 12 avril 2024 par l’ensemble des États membres, introduit la prise en compte, dans les diagnostics de performance énergétique (DPE), des émissions carbone sur l’ensemble du cycle de vie des matériaux et équipements utilisés dans les bâtiments neufs à partir de 2030. « La France est déjà engagée sur cette voie. La réglementation énergétique et environnementale de la construction neuve (RE2020) a introduit cette exigence dès 2022. Ce qui nous manque, c’est une réglementation sur les bâtiments existants » pointe Etienne Charbit, responsable de projets Europe au réseau Cler. Si l’immense majorité des émissions de carbone incorporé d’un bâtiment sont émises lors de sa phase de construction, l’ampleur du chantier de la rénovation invite à s’interroger sur les émissions de carbone associées. Le projet de Stratégie nationale bas carbone (SNBC) prévoit, chaque année jusqu’en 2030, la rénovation énergétique de 400 000 maisons individuelles et 200 000 logements collectifs ! « L’acte de rénover est l’occasion d’agir sur le carbone incorporé, en même temps qu’on agit sur l’isolation et le passage à un chauffage décarboné. Les émissions carbones engendrées par la réalisation de travaux seront largement compensées par les gains carbone à long terme d’une rénovation globale et performante, menée en moins de trois étapes » indique Etienne Charbit.

Un levier sous-exploité

Deux bureaux d’études spécialisés dans l’analyse du cycle de vie, RECto, présidé par Grégory Herfray, et VERSo, dirigé par Marion Sié, ont cherché à objectiver ce phénomène en examinant, dans le cadre de l’étude Perf In Mind II, les performances réelles de rénovations de maisons individuelles. « Globalement, sur les maisons que nous avons analysées, la rénovation énergétique améliore le bilan carbone du bâti, mais avec des résultats contrastés selon la nature des projets » indique Grégory Herfray. « Le changement de vecteur énergétique pour une énergie décarboné, l’isolation de l’ensemble de l’enveloppe ont des impacts bien plus significatifs que le choix des matériaux » confirme Marion Sié. Mais à l’échelle de l’ensemble du parc à rénover, des rénovations qui tiennent également compte du carbone incorporé, représentent un levier non négligeable de baisse des émissions. 

Les propositions du réseau Cler  

–Caractériser, par des études, le carbone incorporé des rénovations énergétiques ;

–Orienter le système d’aides vers les rénovations globales associé au passage à un système de chauffage décarboné des passoires énergétiques ;

–Accompagner le développement de filières de produits de construction et équipements bas-carbone, biosourcés et recyclés ;

–Encourager la sobriété en matériaux et un dimensionnement adapté des équipements lors des rénovations énergétiques.

Publication

Carbone incorporé dans les bâtiments existants : enjeux et propositions

Les objectifs européens et français de baisse des émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur du bâtiment sont ambitieux, c’est pourquoi il est nécessaire de pousser tous les leviers pour les réduire. Découvrez dans ce policy brief les recommandations du réseau Cler sur le sujet du carbone incorporé dans les bâtiments existants.

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