Directive sur les énergies renouvelables : l’Europe doit aller plus loin
Le ré-examen de la directive sur les énergies renouvelables (RED III) a lieu pendant la présidence française du conseil de l’Union Européenne. Dirk Hendricks, secrétaire général de la fédération européenne des énergies renouvelables (EREF) analyse les propositions de révision de cette directive.
« L’Europe ne peut continuer à financer des dictatures par ses achats de gaz et de pétrole »
Quelle analyse faites-vous des propositions de la Commission européenne ?
Dirk Hendircks : Les propositions de la Commission sur les énergies renouvelables sont claires et bien rédigées. Mais elles manquent d’ambition. Les derniers rapports indiquent clairement que si nous voulons respecter les engagements de l’Accord de Paris et limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, nous devons décarboner très rapidement nos sociétés pour parvenir à zéro émission nette avant 2050.
La guerre en Ukraine démontre aussi qu’il est nécessaire de mettre un terme à notre dépendance aux énergies fossiles importées. L’Europe ne peut continuer à financer des dictatures par ses achats de gaz et de pétrole.
La Commission a proposé de porter la part des énergies renouvelables dans la consommation finale brute totale d’énergie d’ici 2030 de 32 % (RED II) à 40 %.
L’état d’esprit des responsables politiques a évolué à cause de la guerre. Au Parlement Européen, même les conservateurs souhaitent désormais un minimum de 45%.
Mais si on veut réellement atteindre les 100% en 2050, cela signifie que l’on reporte l’accélération sur les deux prochaines décennies. Ce n’est pas raisonnable. Il faut commencer dès maintenant avec un développement plus ambitieux.
« La directive révisée va dans la bonne direction, mais elle ne va pas assez loin, pas assez vite et pas assez fort »
Quelles sont les principales avancées de la révision de cette directive sur les énergies renouvelables ?
D.H. : La proposition de révision de la directive sur les énergies renouvelables identifie clairement la nécessité de lever les freins que représentent les procédures administratives. Elle donne aussi plus de visibilité et d’importance au chauffage et au refroidissement. Ce qui fait défaut, par contre, c’est la capacité, pour la Commission européenne, à sanctionner les États-membres qui ne respectent pas leurs engagements. La directive révisée va dans la bonne direction en réaffirmant la nécessité d’accélérer le déploiement des énergies renouvelables, mais elle ne va pas assez loin, pas assez vite et pas assez fort. Il faut être plus audacieux.
Le Green Deal européen promeut la décarbonation de nos sociétés et de nos industries tout en considérant, dans sa taxonomie, le nucléaire et le gaz comme ayant un impact favorable sur l’environnement. C’est en totale contradiction avec un Green Deal durable.
Le nucléaire, outre la question épineuse du traitement des déchets, présente un coût économique extrêmement élevé. Il nous rend dépendant d’un combustible extra-européen. Enfin, se pose la question de la maîtrise technologique, quand on sait par exemple que la Hongrie fait appel au savoir-faire russe pour ses réacteurs…
La présidence française du conseil de l’Europe peut-elle faire avancer les choses ?
D.H. : La France pourrait commencer par arrêter de promouvoir l’énergie nucléaire. Plus sérieusement, la France peut jouer un rôle important dans la promotion du photovoltaïque. Il faut que partout en Europe on puisse installer des panneaux solaires en toiture, sans procédure administrative. En Belgique, où la réglementation impose de ne pas produire plus d’électricité qu’on n’en consomme, certains en sont réduits à allumer leur chauffage électrique en plein été pour réguler leur production ! Il faut mettre un terme à ces absurdités, et le gouvernement français y travaille. La présidence française est aussi l’occasion de finaliser, durant son mandat, la position du conseil de l’Europe sur RED III, et d’accélérer les travaux du groupe de travail énergie. Il est indispensable d’avoir rapidement une décision ferme de l’Union Européenne afin que l’ensemble des États la transposent et la mettent en œuvre. Nous n’avons plus le temps d’attendre.